Nivologie

Un groupe de 5 randonneurs accompagné d'un guide  montent au Col de la Cayole en remontant le vallon. Un ittinéraire classique  en pentes douces et peu engagé. Une avalanche surprend le groupe en fin de matinée,le guide est indemne,déneige une randonneuse enselevie et appelle les secours.

Avertissement

Le but de cet article est  de déterminer l'aspect  technique  du déclenchement de l'avalanche et les causes les plus probables avec les informations dont je dispose, notamment le suivi régulier diu manteau neigeux dans les Alpes du Sud et mes connaissances en nivologie.

Ce n'est en aucun cas une enquête officielle ni une recherche de responsabilité.

Les fait sont révélés dans les journaux  ici nice matin  

 

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Emplacement de l'avalanche. et sa visualisation 3D dynamique

Connaissance du terrain

clpa bn68 cayoleCarte de localisation d'avalanche du secteur de la Cayole en visualisation 3D dynamique

La  radonnée à ski  au  Col de la Cayole est en pentes douces et peu engagée.  L'itinéraire d'hiver doit être précis à certains passages pour  éviter soigneusement les couloirs d"avalanches. Notamment, la trace ne prend pas la route entre le hameau d'Estenc et la Cantonnière  par risque d'avalanche naturel,  mais passe par les larges  prairies au fond de la vallée pour éviter  les nombreuses avalanches qui partent sous les barres et recouvrent la route d'un  dépot de 1 à 2 mètres. 

La trace bleue sur  la carte IGN  est un ittinéraire de ski de printemps mais qui ne convient pas par risque fort.

depart couloir 35 2012 12 11depart couloir35 bis 2012 12 11depot couloir35 2012 12 11 Vers 2000m le sentier passe dans une clairière  dominée par les pentes raides de la tête de la Crépine où deux couloirs répertoriés CLPA 35,  accumulent la neige dans deux réservoirs. Ces zones d'accumulations dans l'axe du col de la Cayole se remplissent rapidement par vent de Nord-Ouest qui accélère au niveau du col. Les dépots viennent mourir au pied de la pente et ne coulent que rarement sur le plat ou passe le chemin.
Pour illustrer la configuration du terrain voici les photos prises en décembre 2012 dans des conditions de vent de Nord-Ouest.

conditions météo des jours précédents

Fortes chutes de neige et redoux

du lundi 19 février 2018 au jeudi 1er mars: Péride froide

Un court mais intense passage chaud du 15 au 17 février(limite pluie-neige vers 3000m) interompt une longue période de froid qui à commencé le 4 février. La deuxième vague de froid après le 18 février, abaisse les températures minimales à -15 C jusqu'au 1er mars, date qui marque la fin de la période froide avec un passage neigeux sur le littoral dans la nuit du 28 au 1er mars.

 

du dimanche 25 Février 2018 au Jeudi 1er Mars 2018 Une épaisse sous couche sans résistance  se constitue

Plusieurs épisodes de neige très froide tombent par vent irrégulier faible à modéré.  Les températures sont très froides entre -10 et -15 et  la neige sans consistance. Les chutes de neige  s'intensifient dans la nuit du 28 février au 1er mars avec des cumiuls de l'ordre de 40 à 50 cm

 Jeudi 1er Mars 2018 Le risque devient fort

Entre le 23 et le 28 février les retours d'Est ne déposent que de faibles quantités de neige sur  le massif du Haut-Var -Haut-Verdon, mais la neige froide et mobilisable est reprise par un vent irrégulier formant des plaques friables, ce qui motive le risque marqué (3 sur une échelle de 5)  . Jeudi 1er mars,  la montée en risque fort (4 /5 )  se justifie par le risque de provoquer des départs accidentels par le passage d'un seul skieur,  ou des départs spontanés par surcharge des importantes chutes de neige tombées dans la nuit du 28 février au 1er mars.

du Jeudi 01 Mars 2018 au Vendredi 02 Mars 2018 Neige lourde sur sous couche sans résistance

Les températures remontent sensiblement de -10 à -3 degrés à 2300m . Dans la nuit et  la matinée du 2 mars, de  nouvelles chutes de neige  de l'ordre de 40 cm se cumulent aux 50 cm  de la veille.  Vendredi 2 mars, la partie supérieure du manteau neigeux  d'une épaisseur de 80 à 100cm, est composée d'une neige dense qui repose sur  une couche de neige légère et froide qui n'est pas encore stabilisée.

Stabilite

2018 03 05 Estenc012018 03 05 Estenc162018 03 05 Estenc18Le sondage est réalisé en foret  3 jours après l'accident sur la rive droite du couloir 35 à 2130m d'altitude. La couche de neige totale est de 2m30 et la sonde s'enfonce de 80 cm dans la neige fraîche sans résistance.
En dessous on trouve une couche de faces planes et une fine croute de regel de 1cm datant du redoux du 15 au 17 février.
Ensuite vient la couche de sable en grains rond reposant sur une épaisse croûte de regel.

L'instabilité provient de l'épaisse couche de neige tombée pendant la remontée des températures, qui repose sur de la neige légère et froide. C'est cet  assemblage qui a provoqué le pic avalancheux du vendredi 2 mars.

3 jours après l'accident, ,la neige a repris un peu de cohésion et  on ne distingue plus la délimitation entre la neige froide et celle tombée pendant le redoux. 

 

Pic avalancheux du vendredi 2 Mars 2018

 Le matin du 2 mars la perturbation active finit de passer et en fin de matinée, le vent se renforce sensiblement de Nord-ouest

2018 03 05 Estenc142018 03 05 Estenc102018 03 05 Estenc09A Estenc,50 à 70 cm de neige sont tombés dans la nuit du jeudi 1er au vendredi  2 mars 2018 et reposent sur de la neige froide de faible cohésion. Les avalanches partent naturellement par surcharge entrainant de gros volumes.  La route entre le hameau d'Estenc et la Cantonnière est recouverte de nombreuses avalanches partant sous les barres. Des cassures linéaires sont visibles à chaque rupture de pente. Tous les couloirs se sont purgés, celui de la Gipière a traversé la route. Les avalanches sont également parties naturellement en forêt et même sur des pentes peu raides.

2018 03 05 Estenc022018 03 05 Estenc04L'avalanche du couloir 35

Selon le rapport de gendarmerie

En garde à vue, le guide de haute montagne a expliqué qu'au moment d'aborder un vallon, sur le  secteur d'Estenc, près du col de la Cayolle, il était parti un peu en avant pour tester et regarder s'il y avait un risque. Selon ses dires, une première avalanche a balayé ses clients restés derrière.
Le temps qu'il se retourne pour revenir sur ses pas, une seconde avalanche s'est déclenchée et l'a enseveli. Il aurait mis trois quarts d'heure à se dégager avant de pouvoir porter secours à ses clients, réussissant à sauver l'une des skieuses, légèrement blessée, avant de constater le décès des autres randonneurs, deux hommes et deux femmes de nationalité française en séjour dans la région.'

Discussion sur les hypothèses

  • Le déclenchement a-t-il pu été provoqué par un un seul skieur?
    C'est peu probable. Le terreain est en pente faible 20 à 25 degrés, peu propice aux déclenchements provoqués. La surcharge d'un seul skieur sur l'épaisse couche de neige fraîche n'est pas assez forte pour mobiliser la couche fragileenfouie à plus d'un mètre.
  • Le déclenchement a-t-il pu être provoqué par la présence du groupe?
    La surcharge est à priori suffisante pour pouvoir déclencher mais cette hypothèse est peu probable si le groupe est resté à l'arrêt et en bordure du couloir. Toutefois cette position à la limite de la forêt est un abri tout relatif dans le cas d'un écoulement important.
  • Un départ spontané peut-t-il être à l'origine de cette avalanche?
    C'est l'hypothèse la plus probable. Vu les quantités de neige et la purge naturelle de tous les  couloirs environnants, y compris en forêtet dans les pentes peu raides, l'avalanches'est très probablement déclenchée spontanément. Mais la mauvaise visibilité n'a pas permis de visualiser les cassuresdu haut du couloir.
    Un facteur déclenchant supplémentaire est le renforcement du vent de Nord-Ouest dans la matinée, qui a pu ramener encore de la neige dans cette pente.

Causes ayant provoqué l'accident

L'hypothèse la plus probable est un départ naturel juste après la fin des chutes de neige. Le vent de Nord-Ouest qui se renforce après le passage de la perturbation  continue de charger la pente. Le départ est provoqué par une surcharge aux ruptures de pentes.

Le déclenchement provqué par le guide est peu probable au vu des pentes faibles et de  la structure de la neige de surface, peu favorable a la formation de plaques à cet emplacement abrité du vent.

 La pression des clients déjà en retard sur le planning a poussé le guide à  sortir dans des conditions nivologiques très défavorables. La mauvaise apréhension de l'ittinéraire a conduit le groupe trop haut dans le couloir 35

 Bulletin du risque d'avalanche pour le 2 mars 

BRA massif du Haut-Var/Haut-Verdon pour le 2 mars( émis le 1er à 16h)